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Minorités religieuses en Europe

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Modalités d’inscription sociospatiale d’un groupement musulman dans un quartier de la région parisienne

BENNOUR Majid

1. Remarques préliminaires

La présence d’un groupement religieux, et particulièrement d’un groupement musulman, dans un quartier périphérique de la région parisienne, se justifie par l’existence d’une population suffisamment nombreuse et stable pour revendiquer et obtenir, auprès des autorités locales, un ou plusieurs lieux de culte. Cette présence peut être plus ou moins visible selon les quartiers : commerces vendant des produits dont la composition ou la fabrication respectent certaines normes religieuses (viande halal) ou signes extérieurs (habits, panneaux de direction, langues, manière d’entrer en relation) traduisant la pratique de la religion .
Azouz Begag et Christian Delorme remarquent que certains jeunes d’origine immigrée saluent en portant la main droite à leur poitrine, salut qui peut alors être interprété comme un signe évident de l’appartenance à la religion musulmane . Mais on peut tout aussi bien remarquer que ce salut, qui a une signification symbolique de respect et de reconnaissance, est parfois également pratiqué par des jeunes non-musulmans, ou des jeunes qui ne sont pas originaires d’un pays musulman. Ce fait a été observé dans le quartier. Ce qui peut indiquer que sa signification n’est pas a priori religieuse et que sa pratique provient peut-être d’une pression sociale. D’ailleurs, rares sont les jeunes qui font vraiment la distinction, en saluant de cette manière, entre musulmans et non-musulmans, voire entre pratiquants et non-pratiquants.
L’anecdote suivante illustre parfaitement toute l’ambiguïté de ce signe : la jeune présidente d’une association laïque, d’origine tunisienne, a été choquée par l’attitude de deux ou trois jeunes qui avaient récemment rejoint l’association musulmane et qu’elle connaissait pourtant depuis longtemps pour les avoir accompagner dans leur scolarité au collège : ils avaient refusé de lui serrer la main pour la simple raison qu’elle était « femme », et donc « impure » au regard des « préceptes islamiques ». « Révoltée », elle a aussitôt entamé un débat avec ces jeunes ; ils l’ont écoutée très sagement avec le sourire, mais ils sont restés hermétiques à tous ses arguments.
Quand ils sont dans le quartier, ou quand ils vont à la mosquée, généralement en fin de journée, les hommes musulmans d’un certain âge sont nombreux à porter l’habit traditionnel correspondant à leurs pays respectifs (djellaba, seroual, babouches, trabouche…). Ce n’est le cas que de certains jeunes qui sont très personnellement impliqués dans la pratique religieuse. Lycéens ou étudiants, âgés de 20 à 25 ans, ces jeunes font de temps à autre le tour du quartier ou de la ville pour rendre « visite », selon leur terme, c’est-à-dire pour dialoguer avec tous ceux qui veulent bien leur prêter une oreille. Ils font alors preuve d’un prosélytisme à la fois bienveillant et tenace. Parlant un français d’un bon niveau, certains peuvent faire des efforts considérables pour apprendre la langue arabe sous sa version littéraire. Leur enthousiasme est sans mesure et ne peut être compris que si l’on observe que leur découverte de la religion musulmane est récente. Parfois maladroits, ils citent pêle-mêle des extraits de versets coraniques pour prouver que le « chemin d’Allah » est préférable à tout autre. Les moins avertis reprennent des bribes du discours d’un imam qu’ils n’ont peut-être pas toujours bien compris pour justifier la supériorité de l’islam sur les autres religions. Mais quel que soit leur niveau de compréhension, leur pratique religieuse est souvent emprunte de tolérance et d’optimisme. Ils disent, d’ailleurs, qu’ils veulent être bien intégrés dans la société française, mais souhaiteraient que les conditions de la pratique religieuse soient mieux prises en compte par les autorités publiques, et que l’image du musulman ne soit pas systématiquement perçue de façon négative.
Les femmes musulmanes portent presque toujours le foulard traditionnel, mais hormis ce fait, elles ne se distinguent pas particulièrement dans leurs habits des femmes européennes ou non-musulmanes qui vivent dans le quartier. Quant aux jeunes filles qui portent le « foulard islamique », nous en avons rencontré dans le quartier. Peu nombreuses et discrètes, elles sont rarement visibles dans les lieux publics ou associatifs.

2. La « question de l’islam » en France : un fait social nouveau ?

Selon les sociétés, les religions n’ont pas le même statut, et cela indépendamment des populations qui y sont présentes, de leur importance numérique ou de leur intégration dans le système social. L’existence d’un lieu de culte correspondant dépend de ce statut, c’est-à-dire de la reconnaissance de la religion concernée par la société en général, et par chaque commune et sa population en particulier. Ce qui ne va pas sans problèmes quand il s’agit du projet d’implantation d’une mosquée dans telle ou telle commune.
La « question de l’islam » s’est ainsi posée à la suite de cette revendication élémentaire dans plusieurs villes de France. L’abandon partiel ou total du « mythe du retour » aurait amené les populations d’origine musulmane à entrer dans un « processus de sédentarisation », et à revendiquer, par conséquent, le respect de leur pratique religieuse. C’est du moins l’hypothèse de Gilles Kepel pour qui « une demande d’islam prend forme à partir des années soixante-dix, et que cette demande correspond à la prise de conscience par beaucoup d’immigrés d’origine musulmane qu’ils sont engagés dans un inéluctable processus de sédentarisation » . On peut donc dater cette « question de l’islam » qui apparaît au milieu des années soixante-dix et qui va marquer un tournant dans la visibilité d’une population à partir de sa pratique religieuse, et non plus seulement à partir de sa position ingrate dans le système économique (travailleurs immigrés, ouvriers spécialisés). En effet, l’affirmation de l’appartenance religieuse, précise Kepel, « ne se produit pas dans le seul cadre privé : en s’exprimant par la création d’associations islamiques, de mosquées et lieux de prières dans les foyers des travailleurs, les usines, les H.L.M. ou les quartiers des villes françaises, elle devient un fait social » .
Cependant, il faut préciser que des lieux de culte, ou plus précisément des espaces de prières ont d’abord été acceptés dans certaines grandes entreprises, comme la régie Renault de Boulogne-Billancourt, employant des travailleurs immigrés de religion musulmane . Cette « prévoyance » de l’employeur pouvait apparaître comme une stratégie de « management paternaliste » visant à empêcher les salariés immigrés de rejoindre les syndicats ouvriers, et ainsi de limiter la portée de certains conflits du travail. Selon le représentant de l’association islamique que nous avons rencontré dans le quartier et qui a travaillé comme ouvrier dans les usines Renault de Billancourt, la direction aurait plutôt « laissé faire les choses », les ouvriers musulmans utilisant progressivement et de manière spontanée certains espaces pour la pratique de la prière durant les pauses de travail. Mais les deux attitudes de la part de la direction ne sont pas forcément antinomiques.
Pour autant, la « question de l’islam » en France ne doit pas occulter d’autres formes aussi « visibles » de la demande des populations immigrées d’origine musulmane. La « marche des Beurs » en 1983, par exemple, et les différentes associations qui se sont créées dans son mouvement ou depuis ne s’inscrivent pas dans des revendications de type religieux, mais bien de type économique, social et culturel . De fait, une « surdétermination » du fait religieux ou de la « demande d’islam » aboutit, de la part de la société d’accueil, à une réponse qui contourne ou évite de poser clairement la « question de l’intégration » en termes non religieux, en déléguant de manière officielle ou officieuse une partie de ses responsabilités dans ce domaine à certains groupements musulmans généralement d’obédience sunnite. Mais peut-être est-il plus facile pour l’esprit de considérer l’étranger dans sa dimension essentiellement religieuse ?
Quoi qu’il en soit, l’islam apparaît en France comme la deuxième religion en nombre de personnes pratiquants ou non, soit entre 4 et 5 millions selon certaines approximations officielles en 2001, après les catholiques, mais avant les protestants et les israélites. Mais ces chiffres, en grande partie en rapport avec l’origine du pays des étrangers, doivent être pris avec précaution, ne serait-ce que parce que l’appartenance à une religion dépend de bien d’autres facteurs.
Dans le quartier étudié ici, le nombre d’habitants appartenant ou censés appartenir à la religion musulmane est difficile à connaître, du fait notamment que le recensement ne tient pas compte de ce critère de l’appartenance religieuse. Le chiffre avancé par les acteurs de terrain – travailleurs sociaux ou représentants associatifs – est très approximatif : un millier de musulmans sur 6 000 personnes habitant le quartier. Ce qui est certain, c’est que la religion musulmane est représentée par des habitants de différentes nationalités ou provenant de différentes régions du monde : Algériens, Marocains, Tunisiens, Sénégalais, Zaïrois, Pakistanais…

3. Présentation du groupement musulman : entre « médiation » et « contrôle social »

L’association musulmane implantée dans le quartier existe depuis le début des années 1980. Elle a été constituée par des « pères de famille musulmans » - tunisiens, marocains, algériens, sénégalais, comoriens – qui, pour la plupart, travaillaient dans les usines Renault de Billancourt et résidaient dans le quartier. Selon son président, l’association regroupe aujourd’hui « une cinquantaine de membres », et pour le lieu de culte « une centaine de musulmans viennent tous les jours pour les prières ». L’organisation de l’association et de la « mosquée » est assez complexe ; elle est régie par des règles religieuses correspondant au courant sunnite majoritaire dans les pays arabes. L’imam , rémunéré modiquement par l’association dont le budget provient essentiellement des cotisations et des dons des membres, dispense également, avec l’aide d’étudiants bilingues, des cours d’arabes à des enfants, garçons et filles, dans une des salles du lieu de culte aménagée comme une classe d’école et pouvant accueillir une vingtaine d’élèves à la fois. Des bénévoles encadrent par ailleurs une activité « d’aide aux devoirs aux élèves du primaire pour lutter contre l’échec scolaire ».

Une « organisation des activités au service de la foi »

La communauté musulmane connaît deux niveaux d’organisation : la gestion du lieu de culte et des activités religieuses, assurée par l’ensemble des pratiquants ou des « compagnons », et l’association musulmane qui semble avoir essentiellement pour rôle d’entretenir des relations « normales » avec l’environnement extérieur (mairie, autres religions, autres associations du quartier). « L’association, explique un jeune membre, est structurée de deux manières. Ce sont les personnes les plus âgées qui s’en occupent. Il y a un intendant, un trésorier et un président. Ce sont des personnes qui ont fondé l’association. Nous, on participe pas. Et il y a le deuxième niveau qu’on appelle Da’wa (propagande). C’est pour ceux qui veulent prêcher pour que la foi se propage. En quelque sorte, je dirais que c’est quelque chose qui est intérieur à la communauté, c’est quelque chose qui est déjà un ordre d’Allah et en même temps une Sunna (tradition). Ca n’a rien à voir avec le cadre associatif. Je dirais que ça soutient l’association, ça permet de mieux faire fonctionner l’association… »
Plus précisément, l’imam encadre les prières et assure les prêches et les cours de religion. Les autres activités (entretien du lieu de culte, aide aux devoirs, enseignement de l’arabe, « rendre visite »…) sont prises en charge par l’ensemble des croyants qui se réunissent chaque soir sous l’égide d’un Émir pour répartir les différentes tâches à accomplir le lendemain : « On se réunit pour la Sûra, c’est-à-dire la concertation, on voit comment on va répartir les tâches de la journée ». Enfin, les représentants officiels de l’association reçoivent les cotisations et gèrent les fonds. Le président, ancien ouvrier qualifié des usines Renault de Billancourt, la représente vis-à-vis des différents partenaires locaux. Il est souvent présent aux réunions organisées par les autres associations du quartier ou par les représentants de la mairie.

Bénévoles pratiquants et « don de soi »

Si on distingue le pratiquant qui ponctuellement fait un don ou rend service à la communauté et le bénévole actif qui assure de façon permanente une activité à l’intérieur du groupement musulman, les proportions sont alors très différentes : une trentaine de bénévoles encadrent les différentes activités.
On peut observer une présence majoritaire des hommes, avec une répartition équilibrée entre les adultes, ouvriers, employés ou retraités, et les jeunes dont la plupart sont étudiants. Mais, l’engagement bénévole est perçu différemment.
Au-delà du souci de pratiquer et de préserver la foi, pour les hommes d’un certain âge, souvent des ouvriers retraités, la participation aux activités religieuses et communautaires correspond à une pratique traditionnelle dans les pays musulmans. D’ailleurs, ces hommes n’ont pas toujours le sentiment de faire du bénévolat. Pour les plus jeunes, en revanche, cette participation peut prendre la forme d’un engagement personnel dépassant le cadre de la stricte observance des obligations religieuses et débouchant sur un « prosélytisme militant ». En effet, pour ces jeunes d’origine africaine en général, et maghrébine en particulier, la religion musulmane n’est pas seulement affaire de pratique, c’est également un moment ou un moyen de (re)découvrir la culture des parents, la « culture d’origine ». Cette recherche personnelle, c’est d’ailleurs ce que signifie en termes islamiques le « petit Jihad », permet de s’approprier des valeurs culturelles véhiculées par la religion en allant dans différents lieux de culte à la rencontre d’autres musulmans, ou en « rendant visite », c’est-à-dire en allant par groupe de deux ou quatre personnes à la rencontre d’autres jeunes dans le quartier ou dans la ville pour propager et expliquer les préceptes religieux .
Un jeune étudiant d’origine maghrébine l’explique en ces termes : « Rendre visite, ça nous sert à nous-mêmes : quand on a le souci pour les autres, ça développe le souci pour nous-mêmes, c’est-à-dire qu’au bout d’un moment, plus tu penses aux autres, plus tu vas penser à toi-même. C’est comme ça qu’on voit les choses, parce qu’il y a une Sunna (tradition) qui dit « vous ne serez pas un croyant tant que vous n’aimerez pas pour votre prochain ce que vous aimez pour vous-mêmes » (…). Quand il y a une visite, on parle de la Grandeur de Dieu, on leur parle, on leur rappelle tout simplement, et bon après, c’est à eux de faire... C’est Dieu qui fait le reste, à eux de réfléchir, de revenir à la raison, de venir dans le droit chemin. »

Contrôler pour stabiliser

Le groupement religieux développe davantage une stratégie de type communautaire, avec l’objectif implicite ou explicite de renforcer un lien de solidarité avec les habitants de même confession. En ce sens, les moyens d’action sont essentiellement internes, car ce groupement agit, en effet, non pas contre, mais à côté d’autres groupements associatifs ou politiques avec lesquels il entretient des relations plus ou moins suivies. Il aurait ainsi un rôle explicite de « médiation » entre tous les habitants du quartier et les « acteurs institutionnels », c’est-à-dire les acteurs disposant généralement de l’initiative de la décision (élus locaux, responsables administratifs, gestionnaires de l’office H.L.M….) .
En réalité, cette stratégie vise le plus souvent à maintenir ou renforcer un contrôle social dans le quartier ou sur les membres du groupement considéré. En fonction des rapports de force et de légitimité, tel groupement religieux, disposant d’une communauté de base importante dans le quartier, peut imposer, de manière plus ou moins insidieuse une pression sociale et psychologique et sur ses membres et sur les autres habitants. On peut prendre l’exemple du groupement musulman. Jouant à fond la « légalité républicaine », du moins dans le discours, ce groupement n’hésite pas à utiliser la « rumeur » comme une arme pour dénigrer l’image des autres groupements ou de certains habitants. Certes, d’autres groupements religieux ou laïcs font de même, et on peut ajouter que le groupement musulman n’est pas un groupement monolithique et qu’il est lui-même traversé par des conflits de personnes ou de doctrine qui donnent lieu à de multiples clivages : par exemple, entre les « modérés » et les « durs » considérés comme « intégristes » ; entre les « vieux » et les « jeunes »… Mais le groupement a l’avantage de mobiliser des « pères de familles » qui imposent le respect à l’ensemble des habitants, et particulièrement aux jeunes. Et les élus locaux, lorsqu’ils détiennent le pouvoir municipal, semblent souvent se satisfaire de cette situation, car le contrôle social sur les jeunes signifie pour eux la « paix sociale » aussi bien du point de vue de la délinquance que de celui des critiques négatives pouvant être portées sur leurs actions dans le quartier.
Ce faisant, ces élus locaux favorisent plutôt, peut-être sans le vouloir, le repli de la communauté et, particulièrement, des jeunes sur leur identité religieuse que leur « intégration » dans la société française.


L’exemple du « mutant »

Bénévole pratiquant, le « mutant » est un type d’habitant qui tente de créer une sorte d’équilibre ou « d’osmose » entre des valeurs culturelles ou sociales contradictoires. Il s’agit dans ce cas des jeunes d’origine immigrée, nés en France ou arrivés dans le pays à un âge qui ne leur a pas permis d’être socialisés dans la « culture d’origine ». De ce fait, ils se trouvent, à leur majorité, investis d’un double rôle : assurer leur intégration complète en France et, en même temps, concilier les valeurs culturelles acquises dans la famille d’origine pour réussir cette intégration.
Adil Jazouli a montré que, pour les jeunes d’origine maghrébine en particulier, il existe trois modèles d’intégration dans la société française : le « modèle assimilationniste », le « modèle retour à l’identité », et le « modèle intégrationniste » . Pour leur part, Azouz Begag et Christian Delorme ont décrit trois types de situations des jeunes dans les quartiers périphériques urbains : les « rouilleurs », les « précaires » et les « intégrés » . Sans entrer dans le détail de ces typologies, nous pouvons considérer que le « mutant » développe un modèle d’intégration de type intégrationniste et se trouve dans une situation sociale d’intégré .
Le « mutant », qui s’engage dans un groupement musulman ou laïc, se dit souvent investi d’une double mission : réinvestir et/ou faire reconnaître sa « culture d’origine » et aider les « petits frères » ou « petites sœurs » à mieux réussir leur intégration. De ce point de vue, des actions de lutte contre l’échec scolaire ou de prévention à la délinquance sont mises en oeuvre soit dans le cadre d’un groupement religieux, soit dans le cadre d’un groupement laïc. Mais en général, toutes les actions qui favorisent à la fois la réussite dans la société d’accueil et la connaissance de la « culture d’origine » sont valorisées.
Si le « mutant » peut favoriser cet équilibre, c’est parce qu’il est à la fois dans le et en dehors du quartier. En effet, il est très attaché à son quartier parce qu’il connaît, en général, tout le monde et que tout le monde le connaît. Ce qui ne l’empêche pas, contrairement à d’autres jeunes, de connaître par ailleurs des lieux de sociabilité différents, soit parce qu’il est étudiant, soit parce qu’il est engagé dans des associations qui n’intéressent pas directement le quartier. Cependant, se présentant volontiers comme un « grand frère » ou une « grande sœur » pour les plus jeunes, le « mutant » se trouve le plus souvent dans une situation transitoire, voire précaire (étudiant, en formation, animateur, chômeur). Il est alors sollicité soit par des groupements institutionnels ou para-institutionnel (association para-municipale par exemple) qui lui proposent des postes d’animateur, soit par un groupement religieux, telle l’association musulmane, qui le projette alors comme un modèle pour les autres jeunes. Dans un cas comme dans l’autre, il se trouve en situation de justifier, par son comportement quotidien, soit de son intégration dans la société d’accueil, soit de son attachement à la « culture d’origine ». Parfois, il tente de concilier les deux en étant à la fois présent dans l’association musulmane et animateur dans une association para-municipale ou bénévole dans un groupement laïc.